Jules Laforgue
1860 – 1887
Le Sanglot de la terre
Poèmes contemporainsdu «Sanglot de la Terre»
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PRIÈRE
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Mon Dieu, c'est assez! Vous qui connaissezL'Eternelle espéranceD'où vient ma langueur, oh! prenez mon coeur,Mon coeur trop immense!Puisque j'ai la foi, oh! délivrez-moiDu coeur qui me torture,De mon coeur trop lourd, où monte l'AmourDe toute la Nature.Qu'il brille, partout, fièvre sans dégoût,Comme une vaste éponge.Aime de Douleur où la vie en fleursPour fleurir encor, plonge.
Qu'il fasse tout pur à travers l'azur,Et couvert d'un ciliceQu'il monte vers vous, insulté de tousEt brûle et resplendisseCalme et radieux, au sein des Cieux,Pour dire, ardent symboleQue le désespoir est le reposoirOù l'Amour se console,Vers qui toute âme vole!
Mon coeur est gonflé d'amour, d'éternelle douleur. Il m'étouffe, ma poitrine s'ouvre, mon coeur bout, énorme et rouge. Il monte dans l'azur solennel du Couchant, il monte et grandit en s'éloignant, et les Mondes viennent graviter au tour, et le consoler par des chants infinis! |