Jules Laforgue
1860 – 1887
Le Sanglot de la terre
Poèmes contemporainsdu «Sanglot de la Terre»
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OH! JE SAIS
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Oh! je sais qu'en ce siècle où pour les saintes fièvresLa jeunesse porte un coeur mortEt ne va plus s'user les genoux et les lèvresQue pour l'idole au ventre d'or,Le jour vient des paris sur un cheval de course,Discute un nouveau pantalonOu flatte de sa main gantée après la BoursePoitrail de femme ou d'étalonEt la nuit – à cette heure où tout être qui penseDevrait contempler loin du bruitLes sphères d'or vaguant par l'éternel silenceAux solennités de minuit, –Vautre son corps poussif sur quelque fille nue,Aux baisers puant le vin bleuEt qu'il a ramassée au premier coin de rueOu dans l'égout d'un mauvais lieu,Ne sait plus sangloter aux heures solitairesN'a pas gémi, n'a pas douté,Et veut pour tout bonheur cuver au choc des verresSes sens repus de volupté.Je sais que le poète assez lâche ou candidePour ne pas ravaler ses pleursSoulève le dédain et qu'un rire stupideSe fait l'écho de ses douleurs.Mais moi si dans ces jours de blasphème et de douteJ'ai devant toi tordu mon coeurPour lui faire suinter ces sanglots goutte à goutteCe n'est pas...Ce n'est pas pour gueuser quelque caresse impureDe cette catin de ruisseauQui dans tous les égouts de la littératureSe fait tirer par le manteau.Non, non si j'ai crié c'est que le cri soulageC'est que le mien gonflait mon seinPlus haut encor, ô marâtre, ô nature,Puisque rien ne peut t'émouvoirje veux, moi, m'enivrer, sans trêve et sans mesureDes voluptés du désespoir |