Jules Laforgue
1860 – 1887
Le Sanglot de la terre
Poèmes contemporainsdu «Sanglot de la Terre»
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IMPASSIBLE EN SES LOIS
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Impassible en ses lois la Force universelleIvre de sa féconditéEn aveugles rayons par la paix solennelleVibrait de toute éternité.Sans repos, sans remords, de vivantes flottillesElle criblait l'immensité,Et les soleils flambants entraînaient leurs famillesAu béant vide illimité.Et la terre troublée en sa vieille inertieSentit, du fond des cieux venu,Comme un étrange appel à bondir dans la vieÀ se ruer dans l'inconnu.Ce fut un coup de sève une ivresse pareilleAu vague et joyeux aiguillonQui fait qu'au renouveau le germe obscur s'éveilleAux fentes chaudes du sillon,Ivre, elle s'élança de la houle sauvageEt bouillonnante du chaosMais soudain vers les cieux jaillit un cri de rageLe Mal s'accrochait à son dosLe Mal qui là dans l'ombre allait flairant sa proiePuis détendant son corps raidiSur ce globe innocent avec un cri de joieAinsi qu'un fauve avait bondi.– oh! ce fut formidable et tragique! l'abîmeÉtait l'azur des anciens jours.En silence, tous deux, le Mal et sa victimeLuttaient, luttaient sous les cieux sourdsLa terre secouant, aveuglée, en délire,Par l'azur ce vautour géantLui, toujours, enfonçant ses ongles de vampireToujours plus avant dans son flanc,Éploya vastement ses grandes ailes noiresEt le sanglot des âges commença.
Galerie d'Orléans, Dimanche, août 1879,après-midi 4 h en sortant de la rue Colbert.
Leur âge nous confond! Pour l'horloge éternelleIls s'éteignent dès qu'ils ont lui:Nous disons hier, demain, ô stupeur, c'est pour elleEternellement aujourd'hui. |