Jules Laforgue
1860 - 1887
Le Sanglot de la terre
4° RÉSIGNATIONS INFINIES
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À SAINT-CLOUD(Sonnet)
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L'après-midi – souvent – à Paris, au mois d'AoûtJe veux fuir les journaux, les fiacres, la poussièreEt les cafés poisseux où ruisselle la bière,Et je prends le bateau qui conduit à Saint-Cloud.
Là, je gravis le parc. Du vert, du vert partout!Je m'étends sur le dos, lâchement, la lumièreDu vaste azur me fait cligner de la paupière,La grande paix des bois calme mon sang qui bout.
Je sens tourner ma tête à suivre les nuagesQui mouchètent le ciel de leurs flocons soyeux,Une immense torpeur me prend; je clos mes yeux...
Je me fonds aux senteurs des fleurettes sauvages,Et je rêve qu'ainsi je m'éparpille aux cieuxDans le bruissement infini des feuillages.
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