Lautréamont
1846 -1870
Correspondance
Lettre IV (à Auguste Poulet-Malassis?)
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Paris, 23 octobre [1869]
Monsieur,
Laissez-moi d'abord vous expliquer ma situation. J'ai chanté le mal, comme ont fait Miçkiéwicz, Byron, Milton, Southey, A. de Musset, Baudelaire, etc. Naturellement, j'ai un peu exagéré le diapason pour faire du nouveau dans le sens de cette littérature sublime qui ne chante le désespoir que pour opprimer le lecteur, et lui faire désirer le bien comme remède. Ainsi donc, c'est toujours le bien qu'on chante en somme, seulement par une méthode plus philosophique et moins naïve que l'ancienne école, dont Victor Hugo et quelques autres sont les seuls représentants qui soient encore vivants. Vendez, je ne vous en empêche pas: que faut-il que je fasse pour cela? Faites vos conditions. Ce que je voudrais, c'est que le service de la critique soit fait aux principaux lundistes. Eux seuls jugeront en ler et dernier ressort le commencement d'une publication qui ne verra sa fin évidemment que plus tard, lorsque j'aurai vu la mienne. Ainsi donc, la morale de la fin n'est pas encore faite. Et cependant, il y a déjà une immense douleur à chaque page. Est-ce le mal, cela? Non, certes. Je vous en serai reconnaissant parce que si la critique en disait du bien, je pourrais dans les éditions suivantes retrancher quelques pièces trop puissantes. Ainsi donc, ce que je désire avant tout, c'est être jugé par la critique, et, une fois connu, ça ira tout seul. T.A.V.
I. Ducasse
M. I. Ducasse, rue du Faubourg-Montmartre, n° 32 |