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- P o è m e s
d i v e r s
posthume 1953
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- La Balancelle
Sous un portrait de Corbière
Un mort trop travaillée
Donc Madame, une nuit, un jour...
Deux dédicaces des «Amours jaunes»
Un distique
Paris diurne
Paris nocturne
Petit coucher (Risette)
Moi ton amour? - Jamais! - ...
Pierrot pendu
Fragment de poème
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- SOUS UN PORTRAIT
DE CORBIÈRE
EN COULEURS FAIT PAR LUI
ET DATÉ DE 1868
- Jeune philosophe en dérive
Revenu sans avoir été,
Coeur de poète mal planté:
Pourquoi voulez-vous que je vive?
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- L'amour!... je l'ai rêvé, mon coeur au grand ouvert
Bat comme un volet en pantenne
Habité par la froide haleine
Des plus bizarres courants d'air;
Qui voudrait s'y jeter?... pas moi si j'étais ELLE!...
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- Va te coucher, mon coeur, et ne bats plus de l'aile.
J'aurais voulu souffrir et mourir d'une femme,
M'ouvrir du haut en bas et lui donner en flamme,
Comme un punch, ce coeur-là, chaut sous le chaud soleil...
Alors je chanterais (faux, comme de coutume)
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- Et j'irais me coucher seul dans la trouble brume
Éternité, néant, mort, sommeil, ou réveil.
Ah si j'étais un peu compris! Si par pitié
Une femme pouvait me sourire à moitié,
Je lui dirais: oh viens, ange qui me consoles!...
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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- ...Et je la conduirais à l'hospice des folles.
On m'a manqué ma vie!... une vie à peu prés;
Savez-vous ce que c'est: regardez cette tête.
Dépareillé partout, très bon, plus mauvais, très
Fou, ne me souffrant... Encor si j'étais bête!
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- La mort... ah oui, je sais: cette femme est bien froide,
Coquette dans la vie; après, sans passion.
Pour coucher avec elle il faut être trop roide...
Et puis, la mort n'est pas, c'est la négation.
Je voudrais être un point épousseté des masses,
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- Un point mort balayé dans la nuit des espaces,
...Et je ne le suis point!
Je voudrais être alors chien de fille publique
Lècher un peu d'amour qui ne soit pas payé;
Ou déesse à tous crins sur la côte d'Afrique,
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- Ou fou, mais réussi; fou, mais pas à moitié.
- UNE MORT
TROP TRAVAILLÉE
- C'était à peu près un artiste,
C'était un poète à peu près
S'amusant à prendre le frais
En dehors de l'humaine piste.
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- Puis, écoeuré de toute envie
En équilibre sur la vie
Et, ne sachant trop de quel bord...
Il se joua, lui contre un mort.
Au bac... - Au bac à qui perd gagne
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- Il perdit, ou, comme on voudra
Donc, dans trois mois, il se tûra!
Pour aller vivre à la campagne
... Trois mois... Ce n'est pas qu'il se pleure...
C'est un avenir à vingt ans,
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- Trois mois pour dorer de bon temps
La pilule du grand quart d'heure...
Vingt-quatre heures, c'est l'ordinaire,
Mais lui faisait tout en flânant
Et voulait prendre de l'élan
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- Puisqu'il n'avait qu'un saut à faire -
Tant en prit (jusqu'à sa pantoufle,
Avant soi voulant tout laver)
Qu'enfin il lui restait de souffle,
Juste assez pour se le souffler.
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- Or, jusqu'au bout dans ses toilettes
Suivant ses instincts élégants,
Lâchant la vie avec des gants
Prit la mort avec des pincettes.
Il fit donc faire en Angleterre
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- Deux fins pistolets de Menton,
L'un, pour s'appuyer au menton
Et l'autre pour faire la paire.
Le pistolet, c'est un peu bête -
Outil presque médicinal -
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- Mais, pour lui, ça n'allait pas mal
Qui manquait de plomb dans la tête.
Et, ma foi, pour se fondre l'âme,
C'est aussi neuf que le poison,
C'est aussi chaud que le charbon
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- Ou que le creuset d'une femme!
C'est une affaire de calibre,
De goût, de dégoût ou d'argent -
Laissons-le donc trois mois chargeant
Ses pistolets. - Il est bien libre. -
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- Et puis, quels bijoux que ces armes
En acier mat, un peu trop sec.
Ça donnait un froid non sans charmes,
Frisson chaud à coucher avec!
Il les avait fait faire exprès,
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- Voulant dans son suprêmc excès
Que ce fût une bouche vierge
Qui lui mouchât son dernier cierge.
Il avait fait graver son nom
En spirale sur le canon,
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- Et comme autour d'un mirliton
Cet aphorisme simple et sage
En vers que je vous transcris tels:
«Ici, ce qui manque aux mortels
Pour savoir mourir, c'est l'usage.
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- Ces pistolets sont une pose.
Eh bien posez comme il posa.
Allez, bourgeois, c'est quelque chose
De poser encor devant ça! -».
Il écrivit à sa maîtresse,
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- Comme on le fait en pareil cas...
- Et même quand on n'en a pas
Alors, c'est «Amanda» l'adresse -
Lui pour que sans pleurer ni rire, elle chantât
Il lui mit ça sur l'air de «J'ai du bon tabac»
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- Mon rat,
«Lis-moi jusqu'au bout, lis ça comme un conte.
Je me suis tué pour tuer le temps.
Je te lègue tout: comme fin de compte
Je laisse après moi: vingt ans, dont 20 francs.
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- «Puis ces pistolets: l'un dans ta ruelle
Avec mon amour, au mur accroché,
Comm' objet d'art et, que lui soit fidèle
À ce dernier feu que j'aurai lâché.
«L'autre encor chargé, mets-le dans ma boîte,
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- Réveille-matin réglé pour ma nuit,
Dans cette couchette un peu trop étroite
Pour mettre au pied ma descente de lit.
«Si tu m'as aimé, ne ris pas ma Belle,
Je ne me fais pas, va, d'illusions.
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- Mais j'étais très mâle et toi très femelle
Et tu m'as aimé... par convulsions.
«Si tu m'as aimé, qu'allais-je donc dire,
Te donner peut-être des rendez-vous?
Tiens, je ris par chic, je veux, je veux rire!...
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- Eh bien! viens pendant qu'on mettra les clous.»
Il se demanda si son âme
Allait crever comme un abcés
Ou s'éteindre comme une flamme,
Puis il se dit: Eh bien! après?
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- Le moment venu (faiblesse physique)
Il s'ingurgita (c'est assez petit)
Un cruchon de rhum, toni-viatique,
Pour se mettre enfin plus en appétit -
Il se mit devant son armoire à glace
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- (Chez le photographe il n'eût pas fait mieux)
Pour se voir un peu tomber avec grâce,
Se jetant encor de la poudre aux yeux.
Froid et brûlant baiser, il colla sur sa bouche
La bouche où son dernier soupir est arrété!...
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- Il tombe, le coup part, suivi d'un éclair louche
Et la charge...
Excellente; il s'est juste raté!
MORALE
Drôle de balle et drôle pistolet!
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- Il en porte aujourd'hui les marques:
Il est marchand de contremarqurs
À la porte du Châtelet.
- Donc Madame, une nuit, un jour que j'étais ivre...
- Donc Madame, une nuit, un jour que j'étais ivre.
Peut-être ivre de vous, j'ai voulu faire un livre
Et je prends un crayon, j'écris sur mes genoux,
Sur le vôtre peut-être - enfin c'est bien à vous
- 5
- Et je puis, par raccroc, qui sait, être un génie
Ou bien un [illisible], enfin toute ma vie
J'ai le droit de me taire et tout ce qui s'ensuit.
Je puis être bête à m'en réveiller la nuit.
Mais va, j'avais toujours dans mon drôle de livre
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- Un joli trait bizarre, un coup de crayon [...]
- UN DISTIQUE
- Mon cher, on m'a volé... - Que je plains ton malheure!
- Oui, mon cher, un album. - Que je plains le voleur!
- PARIS DIURNE
- Vois aux cieux le grand rond de cuivre rouge luire,
Immense casserole où le Bon Dieu fait cuire
La manne, l'arlequin, l'éternel plat du jour.
C'est trempé de sueur et c'est poivré d'amour.
- 5
- Les Laridons en cercle attendent près du four,
On entend vaguement la chair rance bruire,
Et les soiffards aussi sont là, tendant leur buire;
Le marmiteux grelotte en attendant son tour.
Tu crois que le soleil frit donc pour tout le monde
- 10
- Ces gras graillons grouillants qu'un torrent d'or inonde?
Non, le bouillon de chien tombe sur nous du ciel.
Eux sont sous le rayon et nous sous la gouttière
À nous le pot-au-noir qui froidit sans lumière...
Notre substance à nous, c'est notre poche à fiel.
- 15
- Ma foi j'aime autant ça que d'être dans le miel.
- PARIS NOCTURNE
- C'est n'est pas une ville, c'est un monde.
- C'est la mer; - calme plat - et la grande marée,
Avec un grondement lointain s'est retirée.
Le flot va revenir se roulant dans son bruit.
- Entendez-vous gratter les crabes de la nuit...
- 5
- - C'est le Styx asséché; Le chiffonnier Diogène,
La lanterne à la main, s'en vient errer sans gêne.
Le long du ruisseau noir, les poètes pervers
Pêchent; leur crâne creux leur sert de boîte à vers.
- C'est le champ: pour glaner les impures charpies
- 10
- S'abat le vol tournant des hideuses harpies.
Le lapin de gouttière, à l'affût des rongeurs,
Fuit les fils de Bondy, nocturnes vendangeurs.
- C'est la mort: La police gît - En haut, l'amour
Fait sa sieste en têtant la viande d'un bras lourd
- 15
- Où le baiser éteint laisse sa plaque rouge...
L'heure est seule - Écoutez: ... pas un rêve ne bouge
- C'est la vie: Écoutez: la source vive chante
L'éternelle chanson, sur la tête gluante
D'un dieu marin tirant ses membres nus et verts
- 20
- Sur le lit de la morgue... Et les yeux grand'ouverts!
- PETIT COUCHER
(RISETTE)
- Le plaisir te fut dur, mais le mal est facile
Laisse-le venir à son jour.
À la Muse camarde on ne fait plus d'idylle;
On s'en va sans l'Ange - à son tour -
- 5
- Ton drap connaît ta plaie, et ton mouchoir ta bile;
Chante, mais ne fais pas le four
D'aller sur le trottoir quêter dans ta sébile,
Un sou de dégoût ou d'amour.
Tu vas dormir: voici le somme qui délie;
- 10
- La Mort patiente joue avec ton agonie,
Comme un chat maigre et la souris;
Sa patte de velours te pelotte et te lance.
Le paroxysme encor est une jouissance:
Tords ta bouche, écume... et souris.
- Moi ton amour? - Jamais! - Je fesais du théâtre...
- Moi ton amour? - Jamais! - Je fesais du théâtre
Et pris sous le manteau d'Arlequin, par hasard
Le sourire écaillé qui lézardait ton plâtre
La goutte de sueur que buvait ton bon fard.
- 5
- Ma langue s'empâtait à cette bouillie âcre
En riant nous avons partagé le charbon
Qui donnait à tes yeux leur faux reflet de nacre,
À tes cils d'albinos le piquant du chardon.
Comme ton havanais, sur ta lèvre vermeille
- 10
- J'ai léché bêtement la pommade groseille
Mais ta bouche qui rit n'a pas saigné... jamais.
L'amende est de cent sous pour un baiser en scène...
Refais ton tatouage, ô Jézabel hautaine,
Je te le dis sans fard, c'est le fard que j'aimais.
- PIERROT PENDU
- I
La femme est une pilule
Que tu ne sais plus dorer
Ta lyre, outil ridicule
[. . . . . . . . . . . . . . . .]
II
C'est fini la comédie,
- 5
- À la Morgue les Amours!
Arrêtons sur la my-die
La patraque de nos jours.
III
À la maîtresse chérie
De ton chanvre laisse un bout,
- 10
- Elle fut la galerie
Qui l'admira malgré tout.
IV
Va, ça lui portera veine
- Ce dernier noeud de licol
Pour toucher dans la quinzaine
- 15
- Un vrai monsieur en faux-col.
V
Qu'elle corne, la corneuse:
C'est aussi pur mais le soir [?]
Qu'elle râle, la râleuse
Et qu'elle trotte au trottoir.
- FRAGMENT DE POÈME
- Pourquoi n'êtes-vous pas brigand sur la montagne
C'est beau
[Mon dieu] j'ai bien passé deux ans à la campagne
Mais il fallait coucher trop souvent dans les bois
- 5
- Et les carabiniers [en retard quelquefois] quoique toujours trop tard
trop mais et puis plus de hasard
Me gênaient même [alors je me suis dit qu'en somme]
[allons le brigandage en somme]
[Le métier valait mieux de pouilleux gentilhomme]
- 10
- est une [duperie] leurre - [être]
duperie - inventé [?]
j'ai repris à peu près le métier d'homme
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