BIBLIOTHECA AUGUSTANA

 

Christine de Pizan

vers 1364 - vers 1431

 

L'Avision de Christine

 

La tierce partie

 

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V

Entre a parler Christine

de ses males fortunes

 

Ainsi dura celle prosperite par pluseurs annees mais comme la dicte fortune se monstrast envieuse de noz gloires voult restraindre la sourse dont ilz venoient/ et ne fu ce pas par elle voirement chiere maistresse qua cestui royaume fu procure le grief dommage du quel malement se senti le mesnage de maistre thomas ce fu lors que le tres bon sage prince non pas envieilli par cours de nature mais en assez ieune aage comme de .xliiii. ans/ cheut en maladie assez briefve dont il trepassa. helas voirement souvent avient que choses bonnes petit durent. Car encore au iour duy se a dieu plust avoir laissie durer sa vie neccessaire a cestui royaume duquel le gouvernment et estat malement est ores de cellui delors different/ ne fust trop envieillis. Or fu la porte ouverte de noz infortunes et moy estant encore jeunete y fus entree Et comme ce soit de commune coustume des poissans hommes close la bouche grant est le remuement et changement de lestre de leurs cours/ et de leurs lieux de laquelle chose sont causes pluseurs voulentez contraires/ et a peine autrement peust estre se moult grant discrecion ny remedie/ comme il appert du grant alixandre/ sicomme il est escript les divers discors lesqueulx non obstant les partages des regions que il leur avoit limitees tantost apres sa mort entre ses barons sourdirent

Adont faillirent a mon dit pere ses grans pensions plus not .c. franz le moys bien paiez avec ses livres et dons qui gaires moins ne montoient comme apris avoit et lesperance que le dit bon Roy lui avoit donnee de asseoir pour lui et ses hoirs .vc. livres de terres et assez dautres biens dont la deffaulte du ramentevoir au bon Roy et la mort qui trop tost vint ne souffry la ditte promesse sortir son effait non obstant que des princes gouverneurs fu retenu a gages malement amendris et mal paiez/ si fut ia venu le temps de sa viellesce qui en assez brief temps apres cheut en longue impotence et maladie ou maintes souffraittes sourdirent aux quelles eust eu besoing lespargne des choses dependues/ Et pource au mien cuidier est iuste prudent espargne en ieunece qui secourt lomme en sa vieillece durant son sain entendement iusques a la fin recognoiscent son createur comme vray catholique trespassa mon dit pere a leure que devant ot pronostique/ duquel entre les clers demoura renommee que en son temps durant ne plus de cent ans devant navoit vescu homme de si hault entendement es sciences mathematiques en iugemens dastrologie. Avec ce entre les princes et ceulz qui le frequentoient la vraye reputacion de sa prodomie ses biens fais loyaute verite et autres vertus et nul reproche faisoit plaindre sa mort et regraitier sa vie/ en la quelle nulle reprehencion naffiert/ se trop grant liberalite de non reffuser riens que il eust aux pouvres en tant que il avoit femme et enfans ne lui donne/ Et que ie ne le die par faveur de ceste verite sont encores au jour dui maint de ses cognoiscens princes et autres certains comme de experience si fu un tel homme a bon droit des siens plaint et plourez